La cascade

Eirik avait depuis peu quitté son petit marécage paisible. Avide de nouvelles textures et matières, il avait décidé de partir à l'avanture à la recherche de potentiels ingrédients pour de nouvelles potions qu'il avait hâte d'expérimenter.

Au bout de plusieurs jours de voyage sans histoire, il était tombé sur une jolie cascade. Sans grande hésitation, il se dévêti et plongea dans l'eau claire à la recherche de petites plantes de toutes sortes.

Il passa de longs moments à plonger dans l'eau, rapportant invariablement quelques petits végétaux qu'il s'empressait d'enfermer dans un bocal, avant de replonger. Sa curiosité satisfaite, il ressorti de l'eau et s'allongea sur la berge pour se laisser sécher au soleil, avant de repartir en quête de nouveaux ingrédients.

Une fois sec, il s'assura une dernière fois qu'il avait tout ce qu'il désirait avant de se rhabiller et de partir en direction du village, où il ferait escale pour la nuit. Il aimait beaucoup se retrouver au milieu de forêts verdoyantes, aussi, à l'instar du Petit Chaperon rouge, se mit-il en quête de jolies fleurs à cueillir, dans l'espoir de croiser un loup qui le dévorerait. Qui sait ? Dans la panse des loups se trouve peut-être des éléments indispensables à certaines concoctions rares ? Bien décidé à tester les propriétés éventuellement soit curatives ou meurtrières du suc gastrique des loups, Eirik continua son voyage.

Une silhouette avança dans les hautes herbes nonchalamment, ses doigts caressant les pointes douces et effilées des épis. Elle arriva à une clairière, une petite masse derrière elle la suivant, écoutant avec concentration le son d'un doux ronronnement et cherchant sa provenance. Lentement, de son pas léger et minutieux, la silhouette fine marcha vers le bruit qui s'emplifiait considérablement. Elle reconnu alors la paisible cadence d'une chute d'eau vers laquelle elle courru rapidement, assoiffée.

La jeune humaine s'abreuva à l'eau du lac, son compagnon blanc faisant de même à ses côtés. Après quelques grandes gorgées désaltérantes, elle plongea ses mains dans l'eau à nouveau et les referma avant de les ressortir, emprisonnant le clair liquide dans ses mains. Elle versa alors l'eau sur la tête du loup au poil brûlant de chaleur, l'animal inaccoutumé à ce genre de voyage sous le Soleil plombant du midi. Ils allèrent ensuite se reposer au pied d'un arbre, à l'ombre de la lumière, et comtemplèrent la chute tout en écoutant l'orchestre d'insectes chanter.

Après quelques temps, la jeune femme se retourna vers son loup qui semblait endormi et lui flatta la tête doucement. Un léger sourire s'installa sur ses lèvres, ses yeux se pincèrent juste un peu, son visage était paisible et franc. Il était en général assez inconcevable d'imaginer un loup se laissant ainsi toucher la tête, car l'humaine pouvait alors le restreindre de ses mouvements et l'empêcher de se défendre. Ce geste simple témoignait donc de la confiance qu'il avait en la nomade, et d'autre part il était rare de voir la délicate créature des bois afficher une expression si chaleureuse, car elle ne se sentait en harmonie qu'en compagnie de l'animal à la fourrure blanche.

Le temps passa alors qu'ils se reposaient, presque endormis au pied de l'arbre. Le Soleil commençait à teinter les nuages de couleurs de plus en plus flamboyantes, la même scène se répétant à la surface du lac calme et miroitant dans les yeux d'Aläna qui venait de reprendre conscience. Elle écouta quelques moments les bruits environnants qui s'éteignaient peu à peu; les insectes se turent graduellement, les animaux retournaient à leur repaire, les oiseaux se nichèrent. D'autres espèces allaient bientôt faire surface, mais dans cette transition entre le jour et la nuit, tout devint à ce moment précis, merveilleusement tranquille.

Dans ce moment de silence, la dame des bois n'entendait que les feuilles des arbres se frôler dans la brise et l'eau qui s'écoulait de la chute: tout semblait éteint de la longue journée épuisante. La jeune femme observa quelques temps le loup assoupi à ses côtés, puis se leva et enleva ses pièces d'armure une à une, les déposant au pied du saule. Faisant le tout très discrètement, elle étudiait les sons environnant pour s'assurer que personne n'approchait. Ensuite, elle prit ses armes et leurs fourreaux et les allongea de même aux côtés du louveteau.

Elle s'avança vers le lac et s'assit sur la berge escarpée, enlevant ses bottes et délassant sa camisole. La furtive plongea doucement ses pieds à l'eau froide du lac, enlevant les vêtements qui lui restaient et les plaçant tout près du bord de l'eau. Les grillons et criquets commencèrent à chanter faiblement comme la jeune femme s'engouffra dans l'eau claire de la nuit qui approchait rapidement. Elle se lava à l'eau même, frottant sa peau pour l'en défaire de la saleté et mouilla ses cheveux. Quand elle eût fini, l'hybride remonta à la berge et se rhabilla hâtivement, retrouvant sa place auprès de son compagnon somnolent. Elle s'ensommeilla brièvement, collée sur la fourrure chaleureuse du loup blanc qui lui procurait tout juste l'ardeur nécessaire pour qu'elle puisse ignorer le froid de la nuit et sa peau encore mouillée.

Aläna se réveilla d'un coup, son loup était déjà éveillé mais il était resté en place pour l'accommoder. Les feuilles du saule bougeaient dans le vent et créaient des trous de lumière au sol qui dansaient. L'humaine s'abreuva à nouveau à l'eau du lac, puis partit à la recherche de petits fruits à déguster sur la route. Elle trouva une ronce aux mûres comestibles, tandis que son loup grugeait des restes d'oiseau mort et les insectes qui s'y étaient regroupés. Ils partirent en direction de la grande clairière qui était apercevable au loin, croyant qu'ils auraient une meilleure vue des environs rendus là-bas.